Love, etc, -Julian Barnes
"Le monde se répartit en deux catégories : ceux qui croient que la finalité, la fonction, la pédale forte et la mélodie de base de l'existence se résume à l'amour et que le reste-tout le reste- est simplement un etc.; et puis les autres (...) dont la foi se borne aux etc, de l'existence, pour qui l'amour en dépit de ses charmes, n'est qu'une passagère efflorescence de jeunesse, le fiévreux prélude aux changements de couches de Bébé"
Quand je découvre un auteur, j'aime bien commencer par des romans qui ne sont pas d'actualité. Pour Julian Barnes, j'aurais pu me lancer dans un bouquin récent comme "une fille, qui danse" par exemple. J'ai préféré lire "Love, etc," bien plus ancien (1992) car le sujet semblait correspondre à mon humeur du moment, à mon envie de légèreté sans prise de tête, et puis j'aime bien lire des vieux trucs que tout le monde a oublié :))
Donc, une comédie romantique, avec une base assez classique de triangle amoureux. Stuart et Oliver sont amis d'enfance. L'un est timide et manque totalement d'assurance, l'autre est culotté, un brin méprisant vis-à-vis de son ami, et surtout très bavard et pédant. Stuart travaille sagement dans une banque où il gagne de l'argent, tandis qu'Oliver vivote en lui en empruntant et en donnant des cours dans une école anglaise, dont il ne tardera pas à se faire virer. (Pourquoi, je ne vous le dis pas) Stuart rencontre la jolie Gillian, une restauratrice de tableaux, en tombe amoureux et elle aussi. Ils se marient, et c est là que ça se complique. Car Oliver est lui aussi tombé amoureux de Gillian...
Classique dans le sujet, ce roman ne l'est pas dans sa construction, qui donne tour à tour la parole aux protagonistes, ainsi qu'à quelques témoins de l'histoire, chacun donnant sa version en corrigeant sensiblement celles des autres et en s'adressant -vraisemblablement- au lecteur. Je me suis d'ailleurs demandé s'il s'agissait du lecteur, ou d'un psy, ou du romancier lui-même, pourquoi pas. Jusqu'à la fin j'ai douté. Originale et subtile, cette façon de soliloquer, et surtout très théâtrale. On a l'impression d'être dans une pièce, où les personnages cabotinent beaucoup, surtout Oliver, parfait dans le rôle du "salaud".
Je ne peux pas dire que j'ai été emballée sur la durée. J'ai lu ce roman sans déplaisir, mais m'y suis parfois un peu ennuyée, son principal défaut étant une légère tendance au bavardage, et donc quelques longueurs. Les interventions de certains "témoins" dans la deuxième partie du livre sont amusantes, mais n'apportent pas grand chose à l'histoire. Je disais que les personnages cabotinent... parfois trop. Leurs atermoiements ne m'ont pas touchée plus que ça. Quant à la fin, elle surprend, à mon avis, pas dans le bon sens. Je n'ai rien compris à cette conclusion bizarre, que j'ai pourtant relue trois fois. Si quelqu'un pouvait éclairer ma lanterne...
Cela dit, on sourit parfois, et on y trouve aussi de belles choses, sur la vie, l'amour, souvent mélancoliques et amères. J'ai corné pas mal de pages. En voici quelques-unes:
"On a le devoir d'assumer son propre bonheur. On ne peut pas attendre qu'il s'affale chez vous comme un vulgaire paquet.(...) Il y a des femmes qui restent chez elles en se disant : Un jour Mon prince Viendra. Mais ça ne sert à rien, à moins de mettre une enseigne à l'extérieur : Bienvenue Aux Princes."
"L'amour n'a d'autre existence que celle que lui prêtent les gens (...) Il est clair qu'aujoud'hui la plupart d'entre nous le considèrent comme un bien de consommation. Mais pas moi. Si vous voulez mon avis, je pense que le cours de l'amour est artificiellement coté au dessus de sa valeur. Un de ces jours il tombera de haut."