La marche en forêt- Catherine Leroux
"Chacun d’entre eux est relié aux autres par un rayon de lumière. Il s’agit d’un large cylindre, un tube jaune et brillant qui forme un réseau complexe entre les membres de sa famille. Baissant les yeux, elle découvre dans son propre ventre plus de rayons qu’elle ne peut en compter."
Avec la rentrée est revenu pour moi le temps des sagas, qui font oublier le quotidien parfois un peu morne à grands coups de drames fracassants, d'amours contrariées et de lourds secrets de famille. Tout ce dont j'ai besoin en ce moment, des histoires de gens, si possible pas en France, pas en banlieue parisienne (surtout pas !), histoire de s'évader un peu.
"La marche en forêt" conte la grande et belle histoire d'une famille québécoise, les Brûlé, sur plusieurs générations. C'est un régal, pour plusieurs raisons : on est vraiment dans une saga, avec tous les éléments du genre, (des drames, des morts, des mariages et remariages, des amours interdites, des moments d'émotion, il y en a quelques-uns et pas des moindres) mais qui pourtant ne ressemble à aucune de celles que j'ai pu lire jusqu'à présent. Ici pas de narration chronologique et linéaire, on passe d'un personnage à l'autre, d'un paragraphe, souvent assez court, à l'autre. Les époques varient également. C'est déroutant au début, malgré l'arbre généalogique au début du roman auquel j'ai tenté de me référer. J'ai vite abandonné. Sur ma liseuse l'arbre est difficilement lisible et puis il est incomplet. Volonté de l'auteure sans doute, et c'est très bien comme ça. Il n'y a qu'à se laisser porter, être un peu attentif et c'est magique, tout se recoupe, les liens entre les personnages se tissent, on comprend tout très vite. Et les dernières pages expliquent magistralement le lien de l'étrange et violente Alma, sorte de Calamity Jane "explosive", avec le reste du clan Brûlé. La fin du roman est une réussite totale, émotionnellement parlant, ça le fait vraiment;)). Quant à la langue québécoise, c'est un pur délice. ( Ne pas rater les petites notes éclairantes en bas de page !)
Un excellent moment de lecture.
"C’est une boîte à chaussures où l’on garde les lettres. Invariablement, cette boîte côtoie des objets complètement incongrus. Parfois, ce sont des vêtements démodés, parfois du papier d’emballage de Noël, des jouets que l’on garde pour d’éventuels petits-enfants durant des années. La plupart du temps, on ne revisite pas cette correspondance discontinue, ces calligraphies familières et floues, ces bonnes nouvelles et ces vœux datés. Si on s’y risque, c’est soit pour constater l’insignifiance des souvenirs archivés par rapport à ceux qui vivent en nous, soit pour s’étonner de moments, d’années, de périodes entières tombées dans l’oubli comme des arbres abattus dans notre mémoire, amis partis à la dérive, expressions disparues de notre parler, paroles dissoutes sur notre langue "
Le billet de Cuné par ici svp :)
Celui de Yueyin ici
Chez Manou