"Nulle et Grande Gueule"- Joyce Carol Oates
Comme dans la chanson, j'ai deux amouuuuuuuurs... (en fait, plus de deux, comme en témoigne ce blog)
Je parle bien entendu de mes amours littéraires :)) et la grande Joyce Carol Oates en fait partie. Si j'essaye de varier les auteurs et les thèmes le plus possible, je reviens souvent vers elle, comme aujourd'hui avec le roman "Nulle et Grande Gueule", destiné semble t-il aux adolescents. Je l'ai acheté sans trop savoir, rien n'indique précisément qu'il s'agit d'un roman jeunesse, à part peut-être la couverture Folio représentant une jeune fille, casquette à l'envers et tatouage sur la joue. ça pourrait parler d'une ado sans forcément être écrit pour des ados, ai-je pensé, accrochée à cet espoir. Ben oui, la littérature jeunesse, c'est pas trop mon truc...
Ursula, dite la "Nulle", a 16 ans. Très grande, elle est différente des autres jeunes de son âge par sa très grande taille mais aussi son caractère : solitaire, un peu farouche, elle a peu d'amis. Ses parents ne la rejettent pas mais lui préfèrent sa petite soeur, tellement plus... dans la norme.
Matt est une "Grande Gueule", rieur, sympathique, aimant les blagues. Un jour, il menace pour rire de faire sauter le lycée. Cette plaisanterie vraiment très bête va lui coûter cher. Accusé d'être un poseur de bombes, exclu du lycée, il se retrouve complètement seul, désespéré. Qui prendra sa défense? Qui témoignera en sa faveur? Ursula, vous l'avez deviné. Ils ne sont pas amis, mais la "Nulle"est une vraie guerrière, dotée d'un sens aigu de la justice...
Joyce sait tout faire. Oui, il s'agit bien d'un roman jeunesse, et il est tout à fait réussi. Sans facilités, sans caricatures, il peut sans problèmes être lu par des adultes, d'autant que la rumeur, dont chacun peut se retrouver victime, intéresse tous les publics. Ouf ! (Je vous ai dit que j'avais des problèmes avec ce genre...)
La "Nulle" avec ses complexes, ses positions très tranchées, son courage, est une vraie adolescente, aussi insupportable qu'attachante. Ses humeurs variables sont joliment décrites, tantôt "Noir d'encre", tantôt "Rouge Feu". Quant à Matt, je l''ai trouvé un peu moins intéressant parce que c'est un garçon, à cet âge-là ils sont plutôt bêtes, mais son drame soigneusement mis en scène tient le lecteur en haleine jusqu'au bout. L'écriture est moins tranchante qu'habituellement chez Joyce Carol Oates, adaptée à un public plus jeune, mais on y retrouve le rythme, les phrases courtes et nerveuses dont personnellement je raffole. Dès les premières lignes, le lecteur est plongé dans l'action "in medias res"et ne peut plus lâcher le bouquin. Encore un que j'ai lu presque d'une traite. La période est faste !
Elle n'avait jamais appelé, bien entendu.
On aurait dit que Matt avait sur le corps une plaie invisible pour lui, mais visible pour les autres, horrible, à vif. Quand ils le regardaient, ils ne voyaient plus qu'elle. Ils ne voyaient plus Matt Donaghy."
Mais "Nulle et Grande Gueule" est aussi un roman qui parle des relations familiales donc... un de plus pour Sharon !