"Accès direct à la plage"- Jean-Philippe Blondel
Encore un prêt de Philisine et une bonne pioche de plus avec cet auteur que je ne connaissais pas. Un grand merci à toi, ma p'tite Phili !
C'est amusant, mais j'avais un a priori sur ce livre. Pas négatif, mais sans doute à cause du titre, j'ai imaginé quelque chose de léger, une lecture toute fraîche, des rencontres amoureuses au bord de l'eau, des amours de vacances... J'ai pensé : "tiens Phili veut que je me détende "... Je me suis trompée. Ce livre n'a que les apparences de la légèreté. Il est grave et bien plus profond que son titre et sa couverture bleutée ne le laissent supposer.
Des rencontres, le roman en est truffé. Des couples, des familles, des amants, des enfants qui deviendront des adultes, dont les destins se croisent à différentes époques, au travers d'évènements parfois dramatiques, de 1972 à 2002, en divers lieux, tous proches de la mer : Capbreton, Arromanches, Hyeres, Perros-Guirec... Chaque titre de chapitre porte le nom d'un personnage et il m'a fallu un peu de temps pour établir des liens entre eux, pas évidents de prime abord. Afin d'être sûre de tout comprendre, de ne pas laisser échapper des éléments de l'intrigue (des intrigues !) que je sentais se profiler au fil des pages, je suis retournée en arrière plusieurs fois pour relire certains chapitres. Je n'ai pas regretté ce petit effort, car incontestablement ce livre le mérite. La construction est d'une grande originalité, non seulement grâce au chapitrage, aux croisements que l'on découvre tout au long de la lecture, mais aussi par l'insertion de documents à la fin ( lettres, articles de journaux) qui m'ont confirmé que j'avais tout bien compris (ouf !) .
Ce livre est suprenant à plus d'un titre : surprenant par sa composition, mais aussi et surtout par la force et la gravité de son propos. Les relations parents-enfants, entre autres, sont évoquées sous un jour cruel, mais qui sonne terriblement juste. J'ai aimé l'écriture de Blondel, lapidaire, pleine d'émotion contenue. Elle touche au coeur.
J'ai envie de continuer l'aventure avec cet auteur. ça tombe bien Philisine... :-)
Un extrait, que j'ai trouvé très fort :
"Papa?
Oui, Eva. Qu'est-ce qu'il y a mon coeur?
Papa, tu nous emmerdes.
Silence. A peine brisé par la poêle que ma mère vient de lâcher qui s'est écrasée sur le sol de la cuisine.
Papa, tu nous emmerdes vraiment. Tu nous bassines toute la journée avec ton voyage à la noix. Tu ne vas pas passer le restant de tes jours à raconter en long en large et en travers un séjour de trois semaines aux Etats-Unis alors que personne n'en a rien à cirer. Tu ne vas pas non plus continuer à passer tes nerfs sur Christophe alors qu'il n'a rien fait. Tu te comportes exactement comme ton père se comportait avec toi. (...)
Et tu sais quoi, Boris, il n'a pas trouvé de travail à la poste. Il fout rien, Boris, cet été. Mais il ne serait pas venu avec nous pour un empire. A cause de toi. Tellement t'es chiant. Tellement tu fais chier tout le monde.
Tout ça en souriant, le visage doux comme un oiseau tombé du nid, les grands yeux bleus innocents.(...)
Il se lève avec difficulté. Il respire fort.(...) D'un seul coup, il se précipite vers la porte et il sort à toute vitesse. Il pleure. Je l'entends pleurer. Il s'éloigne mais je l'entends quand même.(...)
Elle dit seulement : j'ai bien fait, non?
Je hoche la tête.
Maman hoche la tête.
Je ne voudrais pas être mon père. " (p.66)
D'autres avis chez George, Miss Alfie et bien sûr Philisine...
Et une contribution au challenge "Douce France" d'Evy.