D'acier- Silvia Avallone
"Elle avait l'air de ne connaître du monde, que le meilleur côté"
Deux adolescentes se veulent amies pour la vie, rien ne pourra les séparer, ainsi en ont-elles décidé. A Piombino, ville italienne ouvrière faisant face à l'île d'Elbe, Ana et Francesca ont leur amitié pour seule richesse. Leur beauté suscite bien du désir et des jalousies, mais elles n'en ont cure. Elles s'accrochent à leur amitié lumineuse et solide comme l'acier, réponse insolente à l'acierie qui noircit quotidiennement le ciel de Piombino de sa fumée. La crise n'a pas épargné Piombino et autour des deux jeunes filles, gravitent des pères violents, des mères dépassées et épuisées, du sexe qui s'achète et se vend, de la drogue, de l'inceste... le tout sous un soleil plombé et une chaleur accablante.
Il n'est pas gai le premier roman de Silvia Avallone, que je découvre après le merveilleux "L'amie prodigieuse". Les deux romans ont pour point commun le récit d'une folle amitié entre deux filles mais il me semble que leur ressemblance s'arrête là. "D'acier" se déroule dans les années 2000 et nous ne verrons pas Ana et Francesca évoluer au delà de l'adolescence, contrairement aux héroïnes de "L'amie prodigieuse," devenu une saga en plusieurs volumes. Silvia Avallone concentre sa narration sur une période de la vie de ses personnages, à savoir l'adolescence, et tout ce qu'elle comporte de rêves, d'espoir, d'absolu et de désillusions fracassantes aussi. Elle le fait très bien et "D'acier" se lit d'une traite : il est du genre page-turner, on a envie de savoir ce qui va se passer et ne pas le lâcher. Silvia Avallone a du style, son écriture est à la fois limpide, heurtée, familière et poétique. Il se dégage de ce roman une belle fougue qui colle avec le sujet. Toutefois, j'émettrais bien quelques réserves à l'endroit des clichés auquels "D'acier" n'échappe malheureusement pas.
Les personnages plutôt bien campés et intéressants, les adolescents surtout, manquent tout de même de nuances : Ana et Francesca sont belles, certes. Elles sont très belles, oui. Tellement belles qu'elles éclipsent toutes les filles à l'horizon, qui ne sont pas juste insignifiantes ou moins jolies... Non, toutes celles qui entourent les deux adolescentes se révèlent irrémédiablement moches." Boudin" pour citer Silvia Avallone. L'auteur ne fait pas dans la dentelle et j'aurais aimé trouver Ana et Francesca plus sympathiques. Difficile de s'attacher à elles tant elles sont horripilantes. ok, les ados sont parfois bruts de décoffrage mais dans le cas présent et lorsqu'il s'agit de littérature, c'est dommage. Le roman aurait gagné à être un peu plus subtil et un poil moins mélodramatique. Pour tout dire, je me suis demandée par moments si je ne lisais pas un roman pour adolescents, qui est un genre que j'apprécie disons... moyennement. Enfin, tout cela pour dire que j'aime les situations un peu moins tranchées, les personnages moins comme ci comme ça... "D'acier" pour moi, n'est pas au niveau de "L'amie prodigieuse" tout en restant une lecture agréable, pleine d'émotions, un livre bien écrit que je recommande pour l'été, par exemple. Mais je ne sais pas si j'en garderai longtemps le souvenir.
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"Cette espèce de furie qui accompagne l'éclosion du corps, quand tu as treize ans et que tu ne sais pas quoi en faire"
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"Parce qu'on est nées ensemble, on habite ensemble, on mourra ensemble et on fera tout ensemble"