"Nous avions peur. De tout, de rien, des autres, de nous-mêmes. De la petite comme de la grande histoire. Des honnêtes gens qui, selon les circonstances, peuvent se muer en criminels. De la réversibilité de l'homme et de la vie. Du pire, car il est toujours sûr. Cette appréhension, ma famille me l'a transmise très tôt, presque à la naissance."
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La famille Boltanski constitue un clan dont les membres vivent étrangement agglutinés les uns aux autres. Au centre de ce clan extraordinaire se trouve Myriam/Marie-Elise, la "Mère-Grand" -c'est ainsi qu'elle veut qu'on la nomme- handicapée par la polio depuis les années 30, mais qui possède une force de caractère, une poigne tout à fait étonnantes. Elle est la figure de proue de la tribu Boltanski et le personnage central de "La cache" dans lequel Christophe, le petit-fils, raconte un pan de l'histoire familiale. Histoire narrée par un biais insolite, à savoir une visite de la maison des Boltanski, un hôtel particulier situé rue de Grenelle. De pièce en pièce, se découvrent les membres de cette excentrique famille, en particulier le grand-père Etienne, médecin juif converti, homme brillant, parfaitement intégré, dévoué à la France, condamné par le nazisme à porter l'étoile jaune, à ne plus exercer la médecine et obligé de se réfugier dans l'"entre-deux" pour sauver sa vie, sorte de pièce-cachette à l'intérieur de la maison.
Christophe Boltanski écrit remarquablement bien, c'est un fait. La construction de son récit est tout aussi remarquable et fort bien menée : c'est indéniable...
Malgré les qualités littéraires de "La cache", je suis restée sur le seuil de chaque pièce du début à la fin du livre, incapable de m'attacher à cette famille, dont j'ai eu peine à situer les membres au départ. Je me suis constituée un petit arbre généalogique pour ne pas me perdre totalement et abandonner à la quinzième page. J'aurais bien aimé que l'auteur y pense (il y a bien un plan de la maison qu'on trouve au début du livre, pourquoi pas un arbre?), d'autant que la question de l'identité est au coeur de son récit et que certains personnages portent plusieurs noms, ce qui ne facilite pas la lecture, excusez-moi...
Et puis, il a manqué à ma lecture ce je ne sais quoi de romanesque, ce quelque chose qui m'emporte et me passionne lorsque je lis des histoires de famille. il y a des meubles, beaucoup de meubles, des lieux chargés de sens et d'histoire dans "La cache" mais les personnages, eux, manquent curieusement d'âme. C'est dommage, ils ont pourtant du potentiel, ces Boltanski (et un beau patronyme qui fait rêver, oui je rêve de m'appeler Boltanski, ça sonne magnifiquement. Je suis depuis toujours très sensible aux noms des gens). Ils n'ont rien pour ennuyer le lecteur et pourtant...
Une déception que je partage avec Laure. Merci pour cette lecture commune, chère copine :)
"Cela peut paraître étrange de commencer la description d'une maison par sa voiture. La Fiat 500, tout comme sa grande sœur suédoise, constitue la première pièce de la rue de Grenelle, son prolongement, son sas, sa partie mobile, sa chambre hors les murs, ses yeux, son globe oculaire. À l'égal d'un foyer, elle forme un univers fini, rond, lisse, aussi chaud et rassurant qu'un coin du feu."
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