"Je n'écris pas sur les gens parce que je les aime, je les aime parce que grâce à eux je peux écrire."
Voilà je viens de terminer mon premier roman de Laurent Mauvignier et je suis im-pre-ssionnée.
Tout est impressionnant dans ce livre. C'est un roman "monde", ou plutôt un ensemble de nouvelles, qui va du Japon à Dubaï, en passant par Paris ou Rome, où des dizaines de personnages qui ne se croiseront jamais se trouvent à des moments importants et différents de leur existence. Le fil rouge finalement assez ténu entre ces histoires est la catastrophe de Fukushima de mars 2011, que les personnages vivent de loin, à travers les médias, ou de très près comme dans la première et la dernière histoire.
"Autour du monde " n'est pourtant pas un recueil de nouvelles. En réalité, il est inclassable. Ici, pas de chapitres bien délimités, pas de texte conventionnel avec un titre, des blancs etc. Rien de cela. Le lecteur est emporté comme par une vague (l'image n'est pas très heureuse mais c'est celle qui me vient immédiatement à l'esprit) d'une histoire à l'autre, c'est d'une fluidité extraordinaire et en même temps, lorsqu'on est plongé dans une histoire qui s'interrompt brutalement (une simple petite photo fait le lien) on se sent terriblement frustré d'être abandonné de la sorte. Sauf que l'histoire suivante nous happe aussitôt... et l'écriture, cette écriture... ciselée, parfaite, impressionnante de justesse et de maîtrise, qui nous projette dans le futur grâce à la prolepse (ça pourrait lasser car Mauvignier l'utilise beaucoup, mais pas du tout du tout du tout) impressionnante, oui, impressionnante... J'ai relu la première nouvelle trois fois, elle est terrible, mais les autres sont également très fortes aussi.
La force de ce bouquin, c'est l'émotion qu'il véhicule, identique dans toutes les situations exposées : aussi vive lorsque la catastrophe est vécue en direct que lorsque deux amants se retrouvent pour une nuit d'amour torride qui sera sûrement la dernière, ou qu'un couple est pris en otage par des pirates, au large de la Somalie. C'est à couper le souffle tant c'est intense...
Mon seul regret : avoir été contrainte de le lire par petits bouts, pour cause de Poupouce de onze mois qui commence à crapahuter partout. C'est un livre à lire d'une seule traite, assurément. Peut-être pas le livre de la rentrée littéraire, je n'en ai pas lu assez pour juger. Mais un livre important, qu'on referme avec des images plein la tête, une première et énorme pépite pour le challenge de Galéa.
"Pour l'instant, il entre dans le bureau de poste (...), il imagine les lettres et les colis par milliers, les gens qui circulent au même moment partout dans le monde. Il imagine les montagnes de sacs postaux, et il pense à tous ces mots, par millions, qui s'écrivent, se lisent, se froissent, s'oublient, s'ignorent, et à tous ces gens qui se frôlent et ne se rencontrent jamais."
L'avis de Cuné ici.