"Stoner"-John Williams
Attention gros coup de coeur...
Il y a des livres dont on se demande comment on va en parler, tant on les a aimés. Il y a des livres, franchement, qui se passent de commentaires... on sait juste qu'ils vont rester là, c'est sûr, quelque part, dans la tête et dans le coeur.
En même temps, comme il serait tout à fait criminel de passer à côté, je vais tâcher d'en dire quelques mots. Qui traduiront bien mal, je vous préviens, l'émotion qui m'a étreint tout au long de ma lecture.
Stoner, c'est l'histoire d'un américain qui se destinait à l'agriculture, comme ses parents. Et puis non, il est finalement devenu professeur d'université. L'amour des livres, en dépit des épreuves, mesquineries, petits et gros déboires de la vie, (oh ce mariage avec la triste Edith ...) ne le quittera jamais.
Il ne se passe pas grand chose dans Stoner, rien de transcendant. Stoner vit, souffre, aime, est déçu, aime à nouveau, il écrit, il lit il lit il lit... Et puis voilà.
Qu'est-ce-que c'est beau... plus que ça, c'est magique. Inexplicablement magique. L'écriture (signée Anna Gavalda pour la libre traduction, merci Madame, vous avez fait un travail formidable !) est sans effets de manche. On nous raconte la vie de Stoner, c'est tout. Et ça suffit, je vous jure, pour faire un très grand livre.
Je ne peux que vous le recommander très fort.
"Quand il était très jeune, William Stoner pensait que l'amour était une sorte d'absolu auquel on avait accès si l'on avait de la chance. En vieillissant, il avait décidé que c'était plutôt la terre promise d'une fausse religion qu'il était de bon ton de considérer avec un scepticisme amusé ou un mépris indulgent, voire une mélancolie un peu douloureuse. Mais maintenant qu'il était arrivé à mi-parcours, il commençait à comprendre que ce n'était ni une chimère ni un état de grâce, mais un acte humain, humblement humain, par lequel on devenait ce que l'on était. Une disposition de l'esprit, une manière d'être que l'intelligence, le cœur et la volonté ne cessaient de nuancer et de réinventer jour après jour."
***
"Il n'avait aucun ami et pour la première fois de sa vie, il réalisé à quel point il était seul. Quelquefois, au beau milieu de la nuit, il levait les yeux de son livre et son regard se perdait dans les recoins de sa petite mansarde, là où la lueur vacillante de la lampe n'avait plus prise sur les ombres. Et s'il demeurait ainsi, concentré, immobile, l'obscurité semblait s'animer, se matérialiser et transcender en formes irréelles ce qu'il venait à l'instant de déchiffrer. Alors il avait de nouveau cette impression d'intemporalité et de dédoublement."
D'autres avis chez Alex, Kathel , Antigone ou Malika, qui en a fait un portrait chinois.