images-1

Voici un lecture qui sort de l'ordinaire, en tout cas de mon ordinaire à moi, lectrice de romans, de nouvelles, amoureuse de la chose écrite. Contactée par Krystin Vesterälen, conteuse et diseuse de textes en tous genres, j'ai eu le plaisir de recevoir son"'Odyssée", librement inspirée du grand récit d'Homère, puisant sa force dans une oralité que pendant plus de dix ans, Krystin Vesterälen s'est attachée à restituer.

Expérience peu commune et étonnamment douloureuse que la transmission d'un texte de cette ampleur, où sont convoqués à la fois l'âme de la conteuse, sa voix, son corps tout entier. Comment dire les mots, donner du sens, de l'émotion, du rythme, dans le respect de la forme originelle, sans y laisser sa peau? Ni interprète, ni chanteur, la mission du conteur est singulière et nécessite un engagement absolu.

"Après deux heures de récit, je n'avais plus de jus, plus rien en moi, raconte Krystin. Mon dos était voûté, mes jambes étaient courbaturées et mon visage marqué par une extrême lassitude. Je vomissais toute l'énergie que j'avais reçue". Une épreuve intellectuelle et physique que Krystin Vesterälen, portée par l'immense désir de transmettre, raconte dans une intéressante introduction.

J'étais loin d'imaginer, même après quelques années de théâtre (lointaines), à quel point dompter le texte est une nécessité pour le salut du conteur. Bien sûr, il ne s'agit pas de n'importe quel texte. On parle ici de souffle, d'épopée, de légende, de dieux en colère, de géants, racornis par nos souvenirs de collège... et pourtant quelle puissance dans cette "Odyssée !"

Je ne vous cache pas que la forme du récit m'a déconcertée au départ. Je ne suis guère habituée à lire des poèmes épiques, d'abord conçus pour être entendus. Incantations, rythmes, répétitions, tout cela est certainement sublime à l'oral. La lecture est, disons-le, nettement plus aride. L'Odyssée est une grande aventure riche en évènements, en personnages, on pourrait s'y perdre. Heureusement qu'un lexique est prévu à la fin de l'ouvrage, rafraîchissant du même coup ma mémoire mythologique :)

Malgré la difficulté, c'est tout de même un bonheur de se plonger pendant quelques heures dans cette Odyssée, pleine de sang, de rage et de sensualité. J'aurais vraiment aimé qu'elle me soit contée. On en perd une grande partie à la seule lecture, c'est évident.

Un grand merci à Krystin Vesterälen pour avoir mis son adaptation de ce grand texte, barbare et terrible, entre mes mains.