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Une nouvelle lecture commune à l'initiative de Philisine qui, je crois, nous a fait un beau cadeau en la proposant (pour moi c'était double cadeau, ma p'tite Phili, on se comprend...). "La couleur des sentiments" est en effet un véritable "livre bonheur".

J'ai mis du temps à me remettre de cette lecture et j'ai retardé volontairement l'écriture du billet pour avoir un peu de recul et de pas me contenter de "purée c'est une merveille". A quelques heures de la publication du billet, j'ai donc ressorti le livre de ma bibliothèque, j'en ai relu quelques passages ... et de nouveau je suis retombée dedans.

De l'émotion, de l'émotion... purée, c'est une merveille, je vous dis. ( ça y est, ça la reprend...)

En 1962, dans l'état du Mississipi, la situation des Noirs n'est guère enviable. Pour nourrir leur famille, les femmes travaillent dur pour les Blanches, font le ménage, la cuisine, élèvent avec amour les enfants de la patronne. Certaines sont bien traitées. D'autres ont moins de chance et subissent. Elles n'ont pas le choix.  

Steeker est une bourgeoise blanche un peu différente de ses copines, à commencer par la redoutable Hilly, qui milite pour l'installation de toilettes réservées aux domestiques. Steeker a un physique un peu hors norme (elle est très grande, maigre, pas franchement jolie) et des préoccupations qui le sont autant. Elle s'obstine en effet à découvrir pourquoi Constantine, la bonne qu'elle aimait tant et qui l'a élevée, a disparu du jour au lendemain sans explication. De ses interrogations va naître une idée folle. Ecrire un livre sur la vie des bonnes à Jackson. Deux d'entre elles, Aibileen et Minny (qui vient de perdre son emploi pour de mystérieuses raisons) vont se laisser convaincre, malgré leur crainte, de participer à ce projet risqué mais qui pourrait bien changer le cours de leur vie... 

J'ai eu beau chercher, je n'ai trouvé aucun défaut à ce livre. ( si, si, je vous assure que j'ai cherché !). Il n'est en revanche pas difficile de comprendre pourquoi il fonctionne aussi bien. Tous les éléments sont réunis pour cela. L'histoire est passionnante et ne connaît aucun temps mort. On est suspendu à ce projet de livre, on tremble pour Aibeleen, Minny et les autres, on rêve de les voir s'en sortir... La narration est enlevée, sans monotonie car jouant sur différents points de vue (Steeker, Minny, Aibeleen), l'écriture est agréable, vivante, elle "colle" aux personnages, eux-mêmes formidables. Comment ne pas s'attacher à ces petites bonnes si courageuses, comment ne pas être touché par l'amour d'Aibeleen pour "Baby Girl", la fille de sa patronne? Comment ne pas adorer Minny et son fichu caractère ? Minny, ses nombreux enfants, son mari alcoolique et violent... celle que j'ai préférée entre toutes. Extraordinaire et touchante Minny...

Les bourgeoises blanches sont elles aussi admirablement dépeintes, avec finesse, sans brutalité, sans manichéisme. Leur comportement choque, mais elles nous émeuvent parfois, (Bon, pas Miss Hilly, celle-là est une garce du début jusqu'à la fin, on a juste envie de lui coller des claques) comme Miss Celia, totalement à côté de la plaque, incapable de faire cuire un oeuf, rejetée par les autres blanches dont elle rêve de se faire des amies. Les hommes, s'ils sont plus en retrait, n'en sont pas moins intéressants : Mister Johnny, le mari de Célia, et surtout Stuart, l'amoureux blessé et inconsolable...  

Enfin, l'équilibre parfait entre émotion et humour contribue pour une grande part à la réussite de "La couleur des sentiments". Que de moments savoureux et drôles ! Quelle vitalité, quelle verve chez ces femmes de Jackson ! J'ai terminé le livre à regret,  les yeux mouillés et le sourire aux lèvres. Le bonheur de lecture a été total et j'éprouve une immense gratitude envers l'auteur, Kathryn Stockett, responsable de ce bonheur :-)

 

"La première fois qu'on m'a dit que j'étais laide, j'avais treize ans. C'était un ami de mon frère Carlton. (...)

"Pourquoi tu pleures petite?" m'a demandé Constantine dans la cuisine. 

Je lui répétais ce que le garçon venait de me dire, le visage ruisselant de larmes. (...)

-Bon. Approche, Eugénia." Constantine était la seule à m'appeler de temps en en temps comme le voulait ma mère. "La laideur, on l'a en dedans. Etre laid, ça veut dire être méchant et faire du mal aux autres. Alors, t'es comme ça, toi?

-Je ne sais pas... je ne crois pas", sanglotai-je.

Constantine s'assit à côté de moi à la table de la cuisine. (...) Je sentis son pouce s'enfoncer dans la paume de ma main, ce qui, nous le savions elle et moi, signifiait, Ecoute. Ecoute-moi bien.

"Chaque jour de ta vie, jusqu'à ce que tu sois morte et enterrée, tu devras te poser cette question et y répondre". Constantine était si près que je voyais la noirceur de ses gencives. "Tu devras te demander, est-ce que je vais croire ce que ces crétins diront de moi aujourd'hui?"

Son pouce continuait à presser ma paume (...) J'étais juste assez intelligente pour me rendre compte qu'elle parlait des Blancs. Et même si je me sentais très malheureuse (...) c'était la première fois qu'elle s'adressait à moi autrement qu'à la petite Blanche, fille de ma mère. On me disait depuis toujours ce que je devais penser à propos de politique, de Noirs, du fait d'être une fille. Mais à cet instant, le pouce de Constantine pressé dans ma main, je compris que je pouvais aussi penser par moi-même.  (p. 80)

Je vous invite à aller voir chez les copinautes les différents billets. Je crois que le roman a fait l'unanimité et a bouleversé quelques unes d'entre nous. Il manque toutefois l'avis d'Hélène Choco.

Voici les liens des blogs de mes partenaires pour cette lecture commune. (Un clic !)

Philisine, Hélène Choco, Adalana, Evalire, Shelbylee, Karine.

Encore merci les filles :)